Qui profite des ressources naturelles de l’Afghanistan? (1/2)

© Eric Sutphin
Le Logar traverse les provinces du Wardak, du Logar et de Kaboul.

Les promesses de la création d’un secteur primaire qui relancerait durablement l’économie afghane fleurissent depuis 2011. Alors pourquoi ne s’est-il encore rien passé?

Avant de mettre un terme à son occupation de l’Afghanistan, l’Union soviétique avait découvert que le pays était riche en ressources naturelles. Dans les années 1980, des experts miniers soviétiques établirent des cartes et collectèrent des données qui restèrent inexploitées, oubliées dans les archives de l’Institut géologique afghane à Kaboul jusqu’à l’arrivée des talibans. Ces dossiers révélaient l’existence de grandes quantités de fer, de cuivre, d’or, de cobalt, de terres rares et de lithium dans le sol afghan. Redoutant ce que les talibans pourraient faire de ces richesses, un petit groupe de géologues afghans mirent ces cartes à l’abri chez eux jusqu’à l’arrivée des forces américaines en 2001. Six ans plus tard, l’Institut d’études géologiques des Etats-Unis avait déjà entrepris une étude détaillée des gisements de minerais présents dans le sol du pays. Une note interne du Pentagone affirmait que l’Afghanistan pourrait devenir «l’Arabie saoudite du lithium» – un composant essentiel des batteries de smartphones et d’ordinateurs.

Ces découvertes rendirent fou de joie le gouvernement américain, qui affirma en 2010 qu’il y avait au bas mot 1’000 milliards de dollars (971 milliards de francs) de ressources n’attendant que d’être récoltées. «Il y a un potentiel incroyable ici», disait à l’époque au New York Times le général David Petraeus, alors à la tête du CENTCOM, le Commandement central du département de la Défense des Etats-Unis. Les responsables américains affirmaient que les gisements pourraient donner un coup de fouet à l’économie afghane, générer des milliers d’emplois, faire reculer la corruption et réduire la dépendance du pays à l’aide internationale. En 2015, alors que 60% du budget national est assumé par des donateurs étrangers, l’investissement extérieur est crucial. Jugeant que le ministère afghan des Mines et du Pétrole serait incapable de gérer efficacement une industrie émergente, le gouvernement américain s’engagea à l’aider à mettre en place des mécanismes de reddition de comptes. Malgré cela, les efforts de régulation comme la loi minière – revue en 2014 pour une plus grande transparence – n’eurent que peu d’effet sur l’exploitation minière illégale et le défaut de paiement sur les redevances.

Les signes avant-coureurs étaient là. «L’Afghanistan n’a aucune tradition minière», confiait au NYT Jack Medlin, géologue au sein du programme international de l’Institut d’études géologiques américain. Et durant mon séjour en Afghanistan au mois de mai de l’année dernière, j’ai entendu souvent les habitants du pays dire que cette extension du secteur primaire ne pourrait jamais rapporter assez d’argent pour maintenir à flot l’économie, une fois les aides internationales épuisées. L’expert minier afghan Javed Noorani m’a assuré que le président Ashraf Ghani était «plus limité dans ses actions contre les réseaux criminels qui opèrent dans le secteur minier que ne l’était le président Karzai. Les partenaires qui travaillent au sein de son gouvernement pillent ouvertement nos ressources en pierres précieuses. Son silence et sa passivité me consternent, comme beaucoup d’autres.»

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