Shell, sa coûteuse ambition arctique (1/3)

En 2005, la Royal Dutch Shell achète une plateforme de forage, Kulluk, censée trouver les dernières réserves de pétrole. Récit de son aventure polaire.

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La plateforme Kulluk de Shell.© Dave Nakayama

En 2005, la Royal Dutch Shell, alors quatrième plus grande entreprise du monde, achète une plate-forme de forage à la fois grande – elle s’élevait à près de 75 mètres au-dessus du niveau de la mer – et inhabituellement ronde. La coque de Kulluk était faite d’acier de quatre centimètres d’épaisseur. Sa forme arrondie a été conçue pour amortir les chocs éventuels. Un système d’ancrage à douze points pouvait maintenir en place la coque au-dessus d’un puits de pétrole pendant une journée entière, malgré des vagues de plus de cinq mètres ou une banquise agitée d’un mètre d’épaisseur. Sa mèche de forage, soutenue par un derrick de 49 mètres, pouvait plonger sous la mer à une profondeur de 180 mètres et creuser 6’000 mètres supplémentaires dans les fonds marins, où elle pouvait alors vérifier la présence de gisements de pétrole qui n’existeraient sans cela que dans les estimations des géologues. La plate-forme Kulluk était même dotée d’un sauna. Elle pouvait (en théorie) se rendre là où peu d’autres plates-formes peuvent aller, permettant (toujours en théorie) à Shell de trouver du pétrole que peu d’autres compagnies pétrolières parviennent à dénicher.

Si cette acquisition revêtait une importance capitale, ce n’est pas parce que Shell avait besoin de pétrole mais parce que durant toute l’année précédente, l’entreprise s’était empêtrée dans un scandale impliquant la plus sacrée des promesses d’avenir pour une compagnie pétrolière: ses réserves prouvées. Celles-ci sont mesurées en barils de pétrole, bien que le pétrole en question repose toujours dans le sol. On ne connaît pas son volume total, ou plus exactement celui-ci varie constamment, car la quantité de pétrole qu’un gisement donné peut produire dépend de plusieurs facteurs, humains autant que géologiques. Un même gisement pourra s’avérer plus ou moins rentable si les méthodes de production s’améliorent entre-temps (comme ce fut le cas avec la fracturation hydraulique), si les cours du pétrole grimpent ou descendent (certains gisements de sable bitumineux ne valent tout bonnement pas la peine d’être exploités quand le prix du pétrole n’est pas élevé), si l’environnement réglementaire change (comme ce fut le cas avec le moratoire américain sur les forages offshore après la catastrophe de Deepwater Horizon, en 2010), ou si l’environnement lui-même connaît des transformations (la fonte des glaces dans le Haut-Arctique peut faciliter l’accès à des gisements jusque-là hors de portée).

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