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Quand éclate la Première Guerre mondiale, la Suisse est nettement favorable à l’Empire allemand. Une véritable barrière de rösti – le «fossé moral» – divise le pays, les Romands se montrant «anti-Boches».© DR

Cette Suisse du côté de l'Allemagne

Quand éclate la Première Guerre mondiale, la Suisse est nettement favorable à l’Empire allemand. Une véritable barrière de rösti – le «fossé moral» – divise le pays, les Romands se montrant «anti-Boches».

En 1891, les Suisses comptent parmi les quatre premières nationalités étrangères sur sol français, après les Belges, les Italiens et les Allemands. Cela crée naturellement des liens. Même si grosso modo, l’Allemagne a supplanté la France comme puissance tutélaire depuis la chute de Napoléon III, les Allemands, dont on redoute la proximité, n’ont pas remplacé les Français dans le cœur des Suisses… romands en particulier. Ils vont clairement le montrer durant les terribles années de la Grande Guerre dont nous commémorons le centième anniversaire du déclenchement.

La France fait-elle confiance à la Suisse au moment du déclenchement de la Grande Guerre? Rien n’est moins sûr. Si des Suisses continuent ainsi à jouer un rôle important quoique méconnu dans la construction de la France d’outre-mer, la Suisse n’en a pas moins pris ses distances avec la Grande Nation. Elle a parfois dû endosser à son tour le rôle de médiateur à son égard, mais pas forcément en sa faveur.

Ainsi, en 1900, le président bernois de la Confédération Walter Hauser (1837-1902) arbitre un vieux litige territorial entre le Brésil et la France au sujet de l’étendue réelle de la colonie française de Guyane qui a une frontière commune avec le grand pays d’Amérique du Sud. Hauser tranche en faveur du Brésil, contraignant la France à renoncer à un vaste territoire. Ce qu’il en reste forme ce que l’on nomme sur le plan touristique l’Amazonie française laquelle, au rythme où se déroule la déforestation au Brésil, pourrait tantôt représenter l’Amazonie tout court.

Dépourvue de matières premières, fortement dépendante de sa voisine du nord pour ses échanges économiques, la Suisse est dans la posture d’un Etat non belligérant nettement favorable à l’Empire allemand. Il n’a pas échappé à l’Etat-major français que le corps des officiers supérieurs de l’armée de milice est surtout représentatif des élites germanophiles, d’ailleurs formées à la mode prussienne. Et ce ne sont pas les quelques officiers suisses reçus à la Légion au tournant du XXᵉ siècle qui sont susceptibles de contrebalancer l’esprit germanique au sein de notre armée.

Depuis longtemps déjà, ce qui va devenir le plan «H», pour Helvétie, est là pour pallier à l’éventuelle défaillance des Suisses sur le flanc jurassien de la frontière française. Les observateurs français ont analysé les moindres passages par lesquels une armée allemande aurait pu passer pour enfoncer la frontière française du côté de la trouée de Belfort. Il s’agissait ni plus ni moins que d’aller occuper le massif du Gempen qui, du haut de ses 700 mètres d’altitude, domine la cité rhénane de Bâle.

Pour l’état-major français, l’armée suisse était un maillon faible. Les Français ne se faisaient pas trop d’illusion sur la capacité défensive de l’«Armée fédérale», l’armement helvétique étant déficient. Au cas où l’intervention française se devait d’être rapide. En 1917, la perspective de la victoire allemande s’éloigne et c’est le moment que choisit le général français Weygand pour s’entendre avec le lieutenant-colonel de Goumoëns, de l’état-major helvétique. L’idée est simple: en cas d’agression allemande, des unités françaises seraient concentrées sur la frontière du Jura, sous la protection des forces suisses. Un certain Henri Guisan, appelé à une belle carrière, participe aux discussions.

Au début du conflit à Paris, tout ce qui est suisse allemand est assimilé aux «Boches», comme l’on disait à l’époque. Dans les jours qui suivent la mobilisation, des dizaines de magasins Maggi, notamment, sont saccagés et pillés. La compagnie franco-suisse est soupçonnée d’espionnage. Des rumeurs d’empoisonnement circulent également rapportent Bruno Cabanes et Emmanuelle Toulet, dans un article récent de la revue L’Histoire.

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