Presque tous les après-midis, les habitants du village chinois de Xian se rassemblent et s’asseyent sur le sol du 30, Fanyang Main Street, une allée en brique juste assez large pour permettre aux chariots à trois roues de passer de front. L’allée est jonchée des décombres de maisons démolies ou éventrées.
«Le numéro 30 est la base de notre mouvement anti-corruption», dit Liu Yongquan, l’un des organisateurs de la défense du village. Il a des airs de garçon malgré ses 47 printemps, des zébrures grises parsemant ses cheveux noirs – le résultat selon lui d’années de stress intense. «Dans toute la Chine, peu de villages ont résisté autant que le nôtre.»
Timidement installé au cœur du nouveau centre d’affaires de Canton, la troisième plus grande ville de Chine, le village de Xian et les 1’400 familles qui l’habitent s’étend sur 18 hectares, et il est cerné de tous côtés par des buildings et des tours d’habitations flambant neufs. A l’une de ses extrémités se dresse l’hôtel W, à l’autre un concessionnaire de Lamborghini. A cinq minutes à pied de là, des grues mettent les dernières touches à ce qui sera l’un des gratte-ciels les plus hauts du monde.
Il va sans dire que la terre sur laquelle est assis le village vaut de l’or: les médias nationaux ont baptisé Xian le «village de diamant». En 2009, le gouvernement a lancé un projet de réaménagement du village, en promettant à ses habitants des appartements dans les tours nouvellement érigées en guise de compensation. Mais le projet a été miné par un manque de transparence auquel a répondu un manque de confiance.