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Karine Celhay a subi deux greffes, la première de la moelle osseuse et la seconde des poumons.© Rémi Benoît

Vivre avec l’organe d’un autre

Quand la maladie atteint les organes vitaux, les médecins proposent souvent à leurs patients de les placer sur liste d’attente de greffe. De cette attente à l’appel salvateur, puis de l’opération à la renaissance, quatre femmes transplantées racontent leur quotidien, suspendu à la vie d’un autre.

Toulouse, hôpital Rangueil, 30 mars 2016, 9 h 10. Nicolas Doumerc, chirurgien urologue, enclenche son chronomètre. Cagoule verte vissée sur la tête, masque de protection posé sur le visage, le praticien a coutume de mesurer la durée de chacune de ses interventions. Non par envie de battre des records. Mais par souci des patients. Plus l’opération est courte, meilleure sera la récupération. Devant lui, un homme est allongé, endormi, sur le lit médical au milieu de la pièce. Un anesthésiste contrôle sa fréquence cardiaque, sa tension artérielle et sa respiration. Une infirmière-instrumentiste prépare, sur une table à l’écart du champ opératoire, les ustensiles et les compresses qu’elle remettra au fur et à mesure au praticien, assisté par une interne. Derrière eux, des élèves infirmiers et chirurgiens, adossés au mur blanc, assistent discrètement à l’acte du jour: un don de rein du vivant. Une opération encore rare en France. En 2015, la greffe de rein à partir d’un donneur vivant représentait à Toulouse 32% de l'activité de transplantation rénale contre 16% pour l'ensemble du territoire, alors qu'elle peut atteindre plus de 50% dans les pays scandinaves et anglo-saxons selon l'Agence française de biomédecine.

Dans cette salle d’opération, froide, aseptisée, monochrome, des effluves de détergent se mêlent aux odeurs des nombreux désinfectants utilisés par le personnel médical. Tous les jours, dans ce même bloc, des vies se bousculent et des destins basculent. Pourtant, aujourd’hui, le calme règne. Chacun est à sa place. Chaque geste est millimétré, précis. Calculé. Nicolas Doumerc sait qu’il a entre ses mains deux vies, celle d’Hervé Couderc, le donneur, et celle de Sabine, sa femme, qui recevra dans quelques heures un nouveau rein. Celui qu’Hervé va lui offrir. Seules les vibrations des machines et des pas des infirmières sont perceptibles à l’oreille. Le médecin ne laisse échapper aucun son. Ni aucune émotion. Juste une absolue concentration. Derrière des lunettes à la monture noire épaisse, ses yeux sont rivés sur un petit écran qui diffuse les images de la caméra plongée dans le corps du donneur. Le chirurgien effectue ce qu’on appelle une «néphrectomie coelioscopique», une extraction du rein par petites incisions au niveau de l’abdomen. Muni de deux trocarts qu’il guide avec ses longs doigts, Nicolas Doumerc doit atteindre l’organe et le sectionner. Quarante-cinq minutes plus tard, il apparaît enfin à l’écran.

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