Alexandre Dumas raconte de quelle manière Louise-Henriette-Françoise de Lorraine, quatrième femme d’Emmanuel-Théodore de la Tour d’Auvergne, duc de Bouillon, s’étant éprise du comte de Saxe, a décidé de supprimer la tragédienne Adrienne Lecouvreur.
La duchesse de Bouillon a un tempérament de feu et rien ne l’arrête: «Alors âgée de vingt-trois ans, [elle] était une femme violente, emportée, capricieuse, et surtout excessivement galante, déclare Dumas. La chronique scandaleuse prétendait que ses goûts n’avaient point de limites et s’étendaient des princes aux comédiens.»
De quelle manière procéder pour ne pas attirer l’attention? «Décidée à supprimer l’obstacle qui la gênait, écrit Dumas, la duchesse de Bouillon fit faire des pastilles empoisonnées; puis, comme il fallait trouver un moyen de faire remettre les pastilles à mademoiselle Lecouvreur, elle choisit un jeune abbé, qui avait la réputation de peindre agréablement, pour être l’instrument de sa vengeance.»
Le plan va-t-il pouvoir se réaliser?
Alain Chardonnens, historien, enseignant-formateur à l’Université de Fribourg
Le commencement de l’année 1729 fut signalé par un grand événement dont Paris avait bien besoin pour sortir de la torpeur où il se trouvait. M. le duc de Richelieu revint de son ambassade de Vienne. Déjà depuis trois mois, en récompense des grands services que le duc avait rendus au roi près de l’empereur, le roi l’avait autorisé à porter le cordon du Saint-Esprit.
Le 1er janvier, il fut reçu au chapitre, et le roi lui donna la plaque. Excepté cela, les seuls événements importants continuent à être des morts et des naissances. Madame la marquise de Nesle meurt, et sa fille, madame la comtesse de Mailly, à laquelle nous allons bientôt voir jouer un rôle important, est nommée dame du palais à sa place. Le maréchal d’Uxelles meurt, le maréchal de Villeroy meurt, mademoiselle Adrienne Lecouvreur meurt.
Les trois premières morts ne firent pas grande impression: madame de Nesle était malade depuis longtemps, M. d’Uxelles avait soixante-dix-neuf ans, et M. de Villeroy soixante-seize ou soixante-dix-sept. Mais mademoiselle Lecouvreur était dans tout l’éclat de sa jeunesse, de sa beauté et de son talent; puis des circonstances étranges environnaient cette catastrophe.
Voici ce qu’on raconta à cette époque. Mais, d’abord, quelques mots sur sa vie avant d’en arriver à sa mort.