Jean-Philippe Gaudin: «La migration forcée a toujours été une arme» (1/2)

Avant de quitter en 2015 son poste de chef du renseignement militaire suisse, Jean-Philippe Gaudin a accordé une interview exclusive à sept.info. Sans langue de bois. Premier volet de notre entretien avec celui que le gouvernement suisse a nommé en 2018 à la tête du Service de renseignement de la Confédération. SRC dont il a démissionné en 2021.

Jean-Philippe Gaudin Jean-Philippe Gaudin
Le brigadier Jean-Philippe Gaudin, chef du renseignement militaire Suisse.© Pierre-Yves Massot

C’est un homme de l’ombre. L’un de ceux qui parlent peu et fuient habituellement les lumières des caméras. Durant huit ans, Jean-Philippe Gaudin a dirigé le Service de renseignement de l’armée suisse, le pendant militaire du Service de renseignement de la Confédération (SRC). Huit ans à moderniser une organisation dont l’effectif est classé secret défense. Huit ans pour la faire entrer dans la communauté des services européens. Huit ans aussi pour la reconstruire après différents scandales. Celui des fiches notamment, cette surveillance systématique et illégale des Suisses durant la guerre froide. Ou l’affaire Bellasi, du nom de ce comptable du service qui avait détourné plus de 8,5 millions de francs. Le 31 décembre 2015, le brigadier Jean-Philippe Gaudin a fermé définitivement la porte de son bureau, un petit 30 m² perdu dans l’un des étages ultrasécurisés du Pentagone de l’armée suisse, à deux pas du stade du Wankdorf, dans la banlieue de Berne. Il a remis les clefs à son successeur, le brigadier Alain Vuitel, et pris la direction de Paris pour endosser un nouvel uniforme. Celui d’attaché de défense à la place du divisionnaire Jean-François Corminbœuf, parti à la retraite.

Avant de nous intéresser à votre bilan à la tête du Service de renseignement de l’armée suisse, penchons-nous un instant sur les attentats du 13 novembre 2015 qui ont ensanglanté Paris. Qu’est-ce qui se passe pour un chef du renseignement quand on apprend une telle nouvelle?
Tout d’abord, j’ai été alerté par le Centre de renseignement de l’armée puis, conformément aux procédures, nous avons mis en place une cellule de crise, qui a été sur le pont 24 heures sur 24 durant plusieurs jours, afin de collecter les informations, les analyser et de les transmettre au chef de l’armée. J’ai aussi participé à de multiples séances avec les autres services de sécurité de la Confédération comme les gardes-frontières, la police fédérale ou le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Il est très important d’échanger toutes les informations obtenues par nos différents réseaux civils et militaires.

Pourtant, en Suisse, c’est le Service de renseignement de la Confédération, le SRC, qui évalue la menace terroriste, pas le service de renseignement de l’armée.
C’est absolument correct. Mais même si la responsabilité de la coordination est entre les mains du SRC, tous les organes de sécurité helvétiques sont concernés. Je vous rappelle aussi que l’armée reste la réserve stratégique du pays. Elle a la capacité de réagir rapidement, avec de nombreux moyens en hommes et en matériel. L’armée, c’est aussi 300 hommes déployés dans une vingtaine de pays. Nous assurons leur protection. Raison pour laquelle, quelques jours après les attentats, je me suis rendu à Bruxelles, au quartier général de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique nord), pour rencontrer mes homologues européens et de l’organisation nord-atlantique. Ensemble, nous avons essayé d’analyser cette nouvelle forme de terrorisme. Malheureusement, il n’y a pas énormément de solutions.

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