Guerre des rubis à Montepuez

© DR
MRM détient la la concession d’exploitation de la mine de rubis depuis février 2012.

A Montepuez, le gisement de rubis le plus riche du monde, un général local empoche les bénéfices d’un partenariat entre la Grande-Bretagne et le Mozambique, pendant que les Forces spéciales locales l’aident à voler la terre. Et alors que le siège social de la multinationale répond avec soin aux questions et aux inquiétudes, le gouvernement du Mozambique se contente de faire de l’obstruction.

Il paraît que seuls des criminels étrangers, tanzaniens et somaliens, se sont attristés quand Antoninho, 18 ans, le fils de Geronimo Potia, a été abattu par des agents de sécurité qui patrouillaient dans la région où sa famille vit depuis des générations, au nord du Mozambique. Ces gardes surveillaient les ressources qui appartiennent légalement à Montepuez Ruby Mining (MRM), une coentreprise créée en 2011 par Gemfields en Grande-Bretagne et Mwiriti Limitada, société locale que des liens solides unissent au gouvernement du Mozambique.

Aux yeux de l’entreprise, du gouvernement et des hommes qui l’ont tué, Antoninho était un voleur, un criminel au même titre que les contrebandiers étrangers venus lui acheter ses pierres. Peu importait donc à MRM, qui détient la licence d’exploitation de la mine de rubis depuis février 2012, que le jeune homme ait extrait des pierres précieuses de son propre terrain, près du village où sa famille vit et travaille depuis des générations. Laissé agonisant sur le sol rouge de Namanhumbir le 19 avril 2015, son corps a été rapporté chez son père par ses amis acheteurs tanzaniens et somaliens. Ces mêmes contrebandiers ont aussi fait du porte à porte pour rassembler de quoi payer l’enterrement et soutenir la famille. «Sans eux, le corps de mon fils aurait été laissé là, nous n’aurions pas eu d’argent pour l’enterrer», se désespère Geronimo Potia, dans sa cabane de branchages et de torchis à Muaja, village proche de la zone minière de Namanhumbir.

Ce même 19 avril 2015 où Antoninho est mort, d’autres mineurs sont allés annoncer à Artur Pacore que des hommes de la FIR (Força de Intervenção Rapida, la Force d’intervention rapide, section des Forces spéciales de l’armée) avaient abattu son fils, Manuel, d’une balle dans l’abdomen. «Ils ont dit qu’il s’était traîné hors du gisement de rubis et avait rampé sur une centaine de mètres. Puis il est mort».

Loin de là, à Londres, au siège social de MRM, on se déclare préoccupé par ces meurtres. Dans un long message, un porte-parole affirme que la compagnie aurait été informée de ces cas si les crimes avaient été commis à l’intérieur de ce qui est depuis 2012 la zone de la concession. Elle promet de mener une enquête approfondie. Dans les premières lignes de sa réponse, la compagnie confesse que chercher des rubis à Montepuez n’est tout simplement pas une bonne idée pour les particuliers: «Les mineurs artisanaux risquent leur vie en cherchant des pierres précieuses à la demande d’intermédiaires sans scrupules (et pour la plupart étrangers) qui gèrent un système de contrebande, ne s’acquittent pratiquement d’aucun impôt envers le gouvernement mozambicain, et s’enrichissent aux dépens de la population locale». MRM ajoute que «cette activité minière, qui relève de l’exploitation, est non réglementée, dangereuse et opaque». Par chance, conclut la compagnie, «elle tend à disparaître avec le temps, à mesure que commencent à prendre forme les avantages des méthodes d’extraction formalisée et les bienfaits qui leur sont associés».

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