Larry Ellison, acheteur «providentiel» d'une île hawaïenne (1/3)

© Halibut Thyme
«Le jardin des dieux» sur l'île de Lanai (Hawaï).

Larry Ellison, ex-PDG d'Oracle et cinquième homme le plus riche du monde, a racheté en 2012 Lanai, une île de l’archipel hawaïen, en promettant d’en faire un Eden. Deux ans après, les habitants ont commencé à déchanter.

Henry Jolicoeur est un hypnothérapeute franco-canadien à la retraite, également importateur de produits verriers, qui aime tourner des films documentaires à très petit budget. A l’été 2012, Jolicoeur a lu que Larry Ellison, l’un des fondateurs du géant Oracle de la Silicon Valley et cinquième homme le plus riche du monde, s’était offert 97% de Lanai, une île hawaïenne. Non pas 97% d’une quelconque société, mais 97% d’un lieu physique. Intrigué, Jolicoeur a immédiatement réservé un vol et embarqué sa caméra. Il connaissait un peu Lanai, ayant vécu à Hawaï au cours des années 1990. Cette île est parmi les plus petites et les moins fréquentées de l’archipel hawaïen: un endroit calme et spectaculaire où les pins colonnaires se dressent partout comme des flèches ou de gigantesques plumes de paons; un endroit qui évoque un charmant trou de ver ouvrant sur une lointaine époque. On n’y trouve qu’une seule ville: Lanai City, où vivent la plupart des 3’200 résidents de l’île.

Ellison détenait à présent un tiers de toutes les maisons et appartements de l’île: les deux hôtels gérés par le groupe Four Seasons, l’espace public au cœur de Lanai City baptisé Dole Park et tous les bâtiments alentour: la piscine municipale, le centre communautaire, le cinéma, une épicerie, deux terrains de golf, une usine de traitement des eaux, la compagnie des eaux elle-même, et enfin un cimetière. En une seule grande transaction immobilière estimée à 300 millions de dollars, Ellison a fait main basse sur 352 des 364 kilomètres carrés de l’île. Après quoi il s’est également offert une compagnie aérienne qui connecte Lanai à Honolulu. De tout Lanai, je n’ai entendu parler que d’une poignée d’entreprises (la station-service, la compagnie de location de voitures, deux banques, une coopérative de crédit et un café appelé Coffee Works) qui n’appartenaient pas ou ne payaient pas un loyer à Ellison.

Jolicoeur a passé presque trois semaines à se promener sur l’île, à demander aux habitants de tenir son disgracieux microphone et de confier à la caméra ce qu’ils pensaient de cette gargantuesque acquisition. Tout le monde semblait très, très bien le vivre. «Je voudrais remercier M. Ellison, a dit un capitaine de pêche. C’est un visionnaire, et il prend soin de nous ici, à Lanai.» Quelques paysagistes, montrés en train de ratisser le sol avec assiduité, déclarent des choses comme: «Merci pour le travail, M. Ellison! Merci beaucoup!» Le propriétaire d’un salon: «Je voudrais profiter de cette opportunité pour remercier M. Ellison pour cette reprise incroyable et fantastique de Lanai.» Dans l’Eglise catholique de l’île, le prêtre, vêtu de sa robe violette, entouré d’enfants, lance: «Notre Père qui êtes aux cieux… Nous demandons votre bénédiction pour M. Ellison en particulier et pour tous ceux qui travaillent avec lui, que tous les bons projets et les bonnes intentions qu’il a pour Lanai portent leurs fruits.» Ailleurs, une femme s’écrie, à bout de souffle: «M. Ellison! Merci d’être ici! On vous aime! Je ne vous ai jamais rencontré avant et j’aimerais beaucoup en avoir l’occasion, et j’imagine que vous ferez d’incroyables merveilles pour cet endroit!»

La suite de cette histoire est payante.

Abonnez-vous

Et profitez d'un accès illimité au site pour seulement 7.-/mois.

Je profite → Déjà abonné? Connectez-vous.

Achetez cet article

Nouveau: dès 0.50 CHF, payez votre histoire le prix que vous voulez!

Je me connecte → Paiement rapide et sécurisé avec Stripe