Snowden 11 septembre Snowden 11 septembre
Thomas Drake (à droite) en compagnie des lanceurs d’alerte Jesselyn Radack, J. Kirk Wiebe (debout) et William Binney.© H. Darr Beiser, USA Today

Snowden avant Snowden: feu sur les lanceurs d’alerte (3/3)

Ils s’appellent William Binney, Ed Loomis, Kirk Wiebe, Diane Roark ou Thomas Drake. Ils sont les premiers lanceurs d’alerte de l’histoire de la NSA. Pour les faire taire, le gouvernement américain a sorti la grosse artillerie. Au terme d’un exténuant bras de fer, il parviendra à les mettre à genoux. Mais l’histoire aura des conséquences insoupçonnées pour la NSA.

Quelques semaines seulement après les attaques du 11 septembre 2001, d’inquiétantes rumeurs commencent à circuler à l’intérieur de la NSA (Agence nationale de la sécurité, ndlr). Avec l’approbation de la Maison-Blanche, le plus secret des services secrets aurait violé la loi sur la sécurité intérieure qui interdit la surveillance de citoyens américains sans autorisation de la Justice (loi FISA). William Binney est un républicain bon teint. Son sang ne fait pourtant qu’un tour lorsqu’il apprend que l’administration Bush a lancé un vaste programme d’espionnage, Stellar Wind (Vent stellaire), visant ses concitoyens. Binney s’avère d’autant plus furieux qu’il est convaincu que ce système de surveillance utilise une version modifiée de ThinThread, un logiciel mis au point par lui-même, destiné à rationaliser les banques de données de l’Agence. Seul ce programme conçu par le «geek» en chef de la NSA et son équipe de 16 ingénieurs est en effet capable de cibler des dizaines de millions de personnes. «On avait mis au point des protections afin d’empêcher l’écoute de citoyens américains, il suffisait de les enlever pour cibler n’importe qui», reconnaît William Binney dans le New Yorker avant d’ajouter: «Alors que la surveillance électronique exigeait la formation d’opérateurs humains, l’extraction de données est désormais automatisée, ce qui signifie que le pays tout entier peut être surveillé. En théorie, les responsables américains pourraient espionner le Tea Party, des journalistes, n’importe quel groupe ou organisation. Exactement ce que voulaient empêcher les “Pères fondateurs” de notre pays.»

A la suite du 11 septembre, Binney a reconsidéré sa décision de départ en retraite – question de patriotisme. Effondré par les révélations sur la nouvelle campagne de surveillance des Américains, il claque définitivement la porte de l’Agence avec deux autres de ses collègues, Kirk Wiebe et Ed Loomis. Avant son départ, il rencontre néanmoins son successeur, Thomas Drake, pour l’informer de ce qui se trame à l’intérieur. Depuis sa prise de fonction en date du 11 septembre 2001, Thomas Drake est témoin de «choses étranges» au sein de l’Agence: de l’équipement est déplacé, les agents chargés d’obtenir les mandats FISA de surveillance sont mutés sans explication, des équipes spéciales œuvrent dans le plus grand secret; des employés de l’Agence sont venus lui dire: «Nous sommes en train de surveiller notre propre pays». Pour Thomas Drake comme pour ses compatriotes, la surveillance massive des Américains est un crime odieux, «une violation du quatrième amendement de la Constitution américaine». Drake avait déjà été confronté à ce type de problème alors qu’il travaillait pour les services d’écoute de l’Armée américaine, dans les années 70: «Si on interceptait accidentellement des communications de citoyens américains, des procédures spéciales nous permettaient de purger les informations auxquelles nous n’avions pas le droit d’accéder. Ces procédures avaient été mises en place après le scandale du Watergate, afin d’empêcher que de nouveaux abus d’espionnage ne soient commis.»

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