Troy Lebovici Troy Lebovici
Véronique dans les années 70 exhibant fièrement la croix de guerre allemande héritée de son père.© Chris Laffaille

Sanaa ne répond pas (2/3)

Aventurière, mannequin, call-girl, braqueuse de pharmacie, jet-setteuse. Les Services secrets français ne pouvaient pas passer à côté de Véronique Troitsky dite Troy, alias Alexandra de Germont, alias Véronique Lebovici. Ils l’ont recrutée. Elle en a payé le prix fort.

Le 6 juillet 1977, une Porsche 914 vert pomme flambant neuve, immatriculée 75, fonce à toute vitesse en plein cœur de la campagne du Gers, en direction du petit village d’Aignan, à portée de tir du château de Castelmore qui a vu naître d’Artagnan. Dans cette Occitanie d’un autre temps, on n’a pas l’habitude de voir des voitures de sport, encore moins des roadsters aux couleurs criardes. A bord, deux jeunes femmes. Elles ont décapoté pour mieux sentir la vitesse. La conductrice, cheveux au vent, négocie parfaitement les routes étroites et sinueuses et passe devant la gendarmerie d'Aignan sans ralentir. A ses côtés, une grande brune, lunettes de soleil sur le nez, Françoise Scrivano, dite «Franca», une enfant du pays. C'est elle qui a eu l'idée de cette virée, elle veut présenter son amie à sa famille. La Porsche pile devant l'une des maisons du village. Franca en sort la première et se précipite dans les bras de sa sœur. «Je te présente, Véronique Troy. Mais tu peux l’appeler Véro», lui dit-elle en désignant la conductrice. Elle aurait pu ajouter qu’elle est davantage qu'une amie, sa sœur de cœur et sa collègue. Franca est le mouton noir de la famille, celle qui a mal tourné. Tout le monde le sait. Pour ses camarades du lycée de Vic-Fezensac, la grande ville la plus proche, elle est montée à Paris pour faire le trottoir. Techniquement parlant, ils n’ont pas tort. Depuis peu, elle vit de ses charmes… comme Véronique.

Comment se sont-elles rencontrées? Ne comptez pas sur les documents du carton de vin du père de Véronique pour répondre à la question. En revanche, quelques photos témoignent de leur amitié. Une complicité placée sous le signe de la vitesse et de la beauté éphémère. Elles posent assises sur une grosse moto, Véro le perfecto ouvert sur un col roulé, sa croix de fer nazie toujours autour du cou. Deux bad girls aux sourires étincelants et un peu forcés. En ce début 1977, Véro l’insouciante, la reine de la nuit, l’amazone de la jet-set, n’est plus. Finies les soirées avec acteurs et réalisateurs, les fêtes du festival de Cannes; oubliées les virées à Saint-Moritz ou Ibiza. Après la starlette, place à la courtisane, une femme plus sombre, plus redoutable, plus manipulatrice. Comment a-t-elle basculé du côté obscur de la force pour devenir une créature des Services secrets français? L'un de ses amis d’enfance affirme qu’elle fréquentait une bande de dealers de la place Saint-Michel spécialisée dans le braquage de pharmacies. Prise en flagrant délit, elle aurait été contrainte de rejoindre le SDECE (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage) comme la Nikita de Luc Besson? Véronique Troy était suffisamment connue dans les milieux du cinéma, dont des proches de Luc Besson, pour que la question se pose. Serait-elle la vraie Nikita? Se non è vero, è ben trovato, disent les Italiens; si ce n’est pas vrai, c’est bien trouvé.

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